Comment comprendre la hausse du nombre de catéchumènes ? Qui sont -ils ? Quelques pistes de réponse avec Sébastien Baertschi, coordinateur du catéchuménat des adultes à Genève au sein de l’équipe de la Pastorale des chemins, de l’Eglise catholique romaine à Genève
Sébastien Baertschi : Personne n’a de certitude à propos de ce phénomène. Cela ne semble pas lié à un milieu ou à un contexte particulier, les profils des personnes sont en effet très variés. On peut dire toutefois que depuis plusieurs années, le baptême des enfants en bas âge n’est plus systématique même dans les familles croyantes. De plus en plus de parents renoncent à baptiser leur enfant à la naissance laissant à l’enfant le choix de le faire quand il sera plus grand. Certains franchissent le pas à l’adolescence. Le sens de leur démarche est à chaque fois particulier et unique, dans leur cheminement de vie, cela devient une évidence, mais les raisons diffèrent.
Aujourd’hui nous sentons que, globalement, la pression sociale a nettement baissé. Chez plusieurs jeunes, on observe néanmoins un désir d’affirmer leur propre identité spirituelle. La cohabitation avec d’autres religions présentes dans l’espace public, avec des amis ou des copains qui observent le ramadan par exemple, peut jouer un rôle. Je pense que de nos jours, affirmer une identité a de la valeur, et donc l’identité religieuse également. Il y a une recherche du sacré, du mystère qui peut se traduire par une adhésion à la foi. Dans son travail, Fabienne Veil parle d’un jeune qui s’est senti appelé à découvrir le Christ à travers l’enseignement religieux à l’école. Parfois les adolescents ont eu un contact avec la Bible en dehors de tout contexte ecclésial, à travers l’art, l’histoire de l’art, … J’aime croire que des jeunes peuvent en ces occasions découvrir l’Évangile, et à travers lui, rencontrer Jésus-Christ. Et je crois que l’attrait du Christ est intact et je pars du postulat que, si on Le rencontre, on ne reste pas indifférent.
Comme pour les adolescents, chez les adultes, on observe une tendance à la hausse. Dans cette catégorie d’âge cependant, nous recevons plus de demandes de confirmation que de baptême.
Nous sommes passés d’un total de 21 confirmands adultes pour la période 2021-2022 à sept demandes de baptêmes et 39 confirmands adultes en 2022-2023. Pour 2023-2024, les chiffres étaient de six baptêmes, une entrée en pleine communion et 52 confirmands adultes. En ce début d’année 2024-2025, nous avons 30 personnes inscrites : 19 pour le baptême et onze pour la confirmation*. La porte reste ouverte tout au long de l’année. Comme pour les jeunes, nous n’avons pas de certitude pour expliquer cette progression. C’est un constat.
La Pastorale des chemins propose des rencontres régulières pour accompagner le cheminement des adultes. Ils peuvent rejoindre ces rencontres en tout temps, qu’ils demandent le baptême ou la confirmation. Des paroisses proposent également des parcours.
Au fil du temps, les participants à nos rencontres découvrent les Écritures et approfondissent, dans l’échange et le dialogue, le sens de leur relation au Christ. Le cheminement comprend des étapes à travers des célébrations, des temps de découvertes et de partage. L’âge, les profils, les parcours individuels sont variés. Aussi, nous cherchons à offrir des temps d’animations qui nourrissent tant ceux qui commencent à peine à fréquenter l’Église et à découvrir la Bible que ceux qui ont déjà une expérience ecclésiale et des connaissances.
Étonnamment, nous réalisons que, lorsque nous arrivons à approcher le mystère de la rencontre entre le Christ et la vie des personnes, il n’y a plus de différences entre les participants ! Nous-mêmes, les accompagnants sommes témoins de l’action de Dieu dans l’expérience des personnes. Comme elles, nous devenons des accompagnés cheminant avec le Christ. Nous pouvons vraiment dire qu’il y a toujours de l’inouï dans la Parole de Dieu.
Qu’il s’agisse des jeunes ou des adultes, je crois qu’il y a un saut dans la foi qui s’opère dans la vie des personnes et que c’est ce Dieu qui nous aime et nous a créés libres qui nous appelle à faire ce saut. Je pense que c’est entre cette liberté et le désir de Dieu de nous aimer que se situe cette zone que nous pouvons nommer « l’appel ». C’est là que se rencontrent le désir de Dieu pour nous et notre propre désir de Dieu. Ce qui nous touche tellement chez les catéchumènes est la force de ce désir. Elle nous invite à raviver le nôtre, parfois affaibli sous le poids de nos habitudes.
Article paru dans le n°22 de REGARD – octobre 2024
LE SAVIEZ-VOUS ?
À tout âge, un cheminement vers le baptême, l’eucharistie et la confirmation est possible ! Ce parcours d’initiation aux « sacrements de l’initiation chrétienne » s’appelle le catéchuménat. A Genève la « Pastorale des chemins », service de l’Église catholique de Genève, accompagne les personnes vers le baptême, la confirmation et l’eucharistie, en collaboration avec le diocèse et les paroisses du canton.
Dans le cheminement des catéchumènes, les accompagnants formés proposent l’écoute de la Parole de Dieu pour qu’elle résonne en chacun. Par cette démarche on touche au cœur de l’expérience chrétienne : la rencontre personnelle de Jésus. L’étymologie du verbe accompagner – ad-(mouvement) et cum pane (avec pain) « celui qui mange le pain avec » et du terme catéchèse, – du grec katêkhéô, « faire retentir aux oreilles » – éclairent cette posture.
La catéchèse est le processus de formation de l’Église au service de la croissance de la foi des personnes qu’elle accompagne. Le catéchisme est la doctrine catholique tant sur la foi que sur la morale. Le catéchuménat est le temps de préparation de jeunes et adultes au baptême et à l’Initiation chrétienne.
Le DIRECTOIRE POUR LA CATÉCHÈSE (2020) exhorte à fonder l’activité évangélisatrice sur le kérygme (le contenu essentiel de la foi) et à mettre l’accent sur le style dialogal. Il souligne que le catéchuménat est une source d’inspiration pour toute la catéchèse, car il permet d’initier à la foi chrétienne avec des rites de passage, tout au long du parcours.
>Lire également l’interview de Fabienne Veil, auxiliaire pastorale de l’Église catholique romaine à Genève, elle a la charge de la catéchèse dans l’Unité pastorale Nations-Saint-Jean (qui réunit les paroisses St-Antoine de Padoue, Ste-Jeanne de Chantal, St-Hippolyte et St-Nicolas de Flüe).
Crédit image en Une: Godong