CHAPITRE 4 – Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit
Notre premier geste, au début de la messe, est de tracer sur nous le signe de croix. Quelle est sa signification ? Les réponses avec le résumé du quatrième chapitre du livre de l’abbé Pascal Desthieux « Au coeur de la messe Tout savoir sur la célébration » (Ed. Saint Augustin).
Le signe de croix, geste très ancien, est le signe par excellence des chrétiens. Pourquoi ? Parce qu’il nous relie à l’instrument même de notre salut : c’est par la croix que nous sommes sauvés. Ainsi le plus horrible des instruments de supplice est devenu pour nous ce qu’il y a de plus précieux : le signe de l’amour de Dieu qui s’offre jusqu’au bout pour nous sauver, le signe de la victoire de la vie sur la mort.
Faire sur nous le signe de croix, c’est marquer très concrètement que nous adhérons au Christ qui nous sauve par la croix, et que nous voulons nous offrir avec lui. Le signe de croix est un instrument pédagogique extraordinaire que nous donne l’Église.
Un prêtre âgé, qui avait traversé des moments difficiles et était resté fidèle malgré tout, disait : « Pendant des années, je n’ai pas pu prier, même quand je disais la messe. Cependant, j’ai toujours fait ce que ma mère m’avait appris : tous les matins, quand le réveil sonnait, quelle que soit l’heure, j’ai fait un signe de croix. C’est ce qui m’a gardé dans la foi. »
Le signe de croix est le premier geste de la liturgie. Il place l’ensemble de la célébration dans la lumière de la croix et de la résurrection – ces deux mystères étant inséparables. Il nous introduit dans ce que nous allons vivre : à chaque messe, nous sommes au pied de la croix.
En effet, la messe nous permet de revivre le don de Jésus sur la croix. Entendons-nous bien : la passion du Christ est un événement unique. Mais pour que les générations futures soient incorporées à cet événement de salut, le Christ a institué le sacrifice qu’il allait accomplir en prenant le pain et le vin et en demandant de refaire cela en mémoire de lui.
« Au moment de la consécration, écrivait le cardinal Journet, les deux mille ans qui nous séparent de la Croix sont abolis : nous sommes là comme l’étaient la Sainte Vierge et saint Jean. »
La croix posée sur l’autel est là pour nous le rappeler. Mais souvenons-nous qu’il y avait deux manières d’être au pied de la croix. La première était celle de la plupart des contemporains du Christ : ils étaient là physiquement, mais indifférents, en curieux, amis et ennemis du Christ mélangés. La deuxième était celle de Marie et de Jean : ils se tenaient au pied de la croix non seulement avec leur corps, mais aussi avec tout leur coeur. Ils s’unissaient à l’offrande de Jésus et ils en accueillaient les fruits. Puissions-nous vivre la messe comme la Vierge Marie et Saint Jean !
Ces paroles, qui accompagnent le signe de croix, ouvrent la liturgie. Elles indiquent que tout ce que nous allons dire, vivre, célébrer se fera « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ». La messe commence donc par une première profession de foi en notre Dieu Trinité. Les chrétiens y adhèrent entièrement par l’Amen qu’ils prononcent. Notre Dieu est Trinité, et cela change tout.
Maurice Zundel, prêtre neuchâtelois et grand mystique, allait jusqu’à dire que la Trinité nous délivre d’un épouvantable cauchemar, celui d’un Dieu qui serait solitaire, un Dieu pharaonique qui ne pourrait passer son éternité qu’à se contempler lui-même et à exiger de ses créatures qu’elles aussi le louent et l’admirent. La Trinité nous apprend que notre Dieu est famille et communion. Que Dieu n’est pas tourné vers lui-même, mais vers l’Autre.
La messe est bien ce débordement d’amour, ce don total du Dieu Trinité.
Les premières paroles de la liturgie renvoient également à notre baptême, ce jour où nous avons été baptisés « au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ». Les premières paroles de la messe nous rappellent donc l’essentiel de notre vie chrétienne et nous y replacent.
Plus encore, l’Eucharistie est « nourriture » de notre baptême,. Elle est combustible de notre vie chrétienne, en nous faisant entrer toujours plus profondément dans la Sainte-Trinité, dans laquelle nous avons été immergés.
En communiant au Corps du Christ, nous devenons toujours plus fils et filles du Père. En effet, Jésus, le Fils bien-aimé, vient vivre en nous, nous conduit vers le Père et répand en nous l’Esprit filial.
©Hélène VDB
« Le Seigneur soit avec vous ! – Et avec votre esprit. » Ce dialogue résonne à quatre reprises, dans chacune des quatre grandes parties de la messe :
– au début de la liturgie de l’accueil ;
– lors de la liturgie de la Parole, pour introduire la proclamation de l’Évangile ;
– au moment de la préface, pour ouvrir la grande prière eucharistique ;
– à la fin de la messe, pour annoncer la conclusion avec la bénédiction et l’envoi.
Ce dialogue résonne donc aux moments importants de la messe, pour inviter l’assemblée à se tourner vers le Seigneur et à lui ouvrir son coeur. Plus profondément, le dialogue liturgique entre le prêtre et l’assemblée prolonge le dialogue entre Dieu et l’homme : l’Époux et l’Épouse se parlent avant de s’unir dans le mystère.
Dire « Le Seigneur soit avec vous », c’est reconnaître que Dieu est là et qu’Il fait Alliance avec nous. Entendre cette bénédiction et l’accueillir, c’est entrer dans cette Alliance de Dieu avec nous, et la renouveler. « Le Seigneur soit avec vous » est une salutation pleine de force, une bénédiction du Seigneur et aussi un magnifique acte de foi dans l’Alliance qu’Il conclut avec nous. Le prêtre, en prononçant ce salut, ouvre largement les bras et les mains ; ce geste signifie et réalise le don de la présence de Dieu.
Ce sont les mots mêmes de Jésus, le soir de la résurrection, quand il apparaît aux apôtres apeurés ; il leur dit à deux reprises : « La paix soit avec vous ! » (Jean 20, 19 et 21) Seuls les évêques reprennent liturgiquement cette formule pour manifester qu’ils sont, en droite ligne, les successeurs des apôtres qui ont eu le privilège de voir de leurs yeux le Christ ressuscité.
La réponse des fidèles « Et avec votre esprit » peut nous sembler étonnante. De quel esprit parle-t-on ? En hébreu, le mot esprit désigne toute la personne. Progressivement, le sens de cette expression a évolué. Au IVe siècle, saint Jean Chrysostome nous dit que, dans la réponse « Et avec votre esprit », le mot esprit désigne le Saint-Esprit qui a été communiqué au prêtre de façon particulière pour qu’il préside l’Eucharistie au nom de Jésus.
Ce premier dialogue de la célébration est important : il nous constitue en un seul corps, l’Église, qui se rassemble pour célébrer le Père, par le Christ, dans l’Esprit. Soyons attentifs à notre manière d’entrer en célébration. Veillons à ne pas faire le signe de croix distraitement et machinalement, mais laissons-nous étreindre par notre Dieu Trinité.
Accueillons la salutation du célébrant comme une bénédiction du Seigneur qui nous promet sa présence, et que notre réponse soit une sincère reconnaissance pour le ministère que le prêtre exerce généreusement parmi nous.
SD&C- ECR, mars 2025
Texte d’après le livre de l’abbé Pascal Desthieux Au coeur de la messe Tout savoir sur la célébration (Ed. Saint Augustin). Extraits librement résumés.
Les chapitres précédents sont disponibles ICI
Crédit image de couverture: Philippe Lissac / GODONG