Les messes/Laudes Rorate» sont célébrées tôt le matin durant le temps de l’Avent.
Nous venons d’entrer dans le temps de l’Avent. Dans le passage évangélique du premier dimanche, Matthieu place dans la bouche de Jésus cette exhortation : « Veillez ! car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient ». En fait, quelle que soit l’année liturgique qu’il inaugure, le premier dimanche de l’Avent appelle les croyants à ne pas baisser la garde, à rester vigilants, éveillés, prêts !
Le décor est donc planté, et puisque nous devons « tenir notre lampe allumée », nous devons au préalable discerner dans quelles ténèbres nous évoluons… Des ténèbres que plusieurs paroisses genevoises nous proposent de dissiper lors des Messes/Laudes Rorate, que la tradition fait remonter au Moyen-Âge germanique.
Les messes (ou Laudes) Rorate sont des liturgies célébrées avant la fin de la nuit, éclairées à la seule lumière des bougies. Le terme Rorate est emprunté à l’introït grégorien du 4e dimanche de l’Avent : « Rorate caeli desuper, et nubes pluant justum. » Cieux, répandez votre rosée, et que des nuages pleuve la justice (Is 45, 8).
À cette mélodie peu encline à rassembler les voix à l’unisson, on se réfère surtout aujourd’hui au cantique à refrain Rorate caeli, que le Liber usualis grégorien classe parmi les varia, chants pour les divers temps de l’année (comme Adeste fidèles, Attende Domine…)
Les messes Rorate se veulent l’illustration tangible d’un peuple de veilleurs, en réponse à Saint Paul dans la 2e lecture du 1er dimanche de l’Avent : « Frères, c’est le moment, l’heure est déjà venue de sortir de votre sommeil […] La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche. » (Rm 13,11a.12a)
Nous sommes ce peuple dont Isaïe contera la naissance au Jour dans la Nuit de Noël : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. » (Is 9,1)
Nous sommes ce peuple qui criera, un peu plus tard, avec le vieillard Syméon, nunc dimittis : « Maintenant, ô Maître Souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta Parole car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : Lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. » (Lc 2,29-32)
Participer à une Messe ou à des Laudes Rorate, c’est se reconnaître en déficit de Lumière. C’est se faire veilleur, guetteur d’une aube nouvelle pour l’humanité. Cette aube nouvelle, elle eut lieu, autrefois, dans cette merveilleuse Nuit de Bethléem.
Mais sommes-nous assez humbles pour avouer notre faiblesse, notre retour aux ténèbres ?
Et serons-nous assez fous pour oser croire que cette Lumière que nous espérons, pour laquelle nous veillons, peut renaître en nous à Noël. Mais aussi à chaque fois que nous nous tournons vers cette petite flamme qui luit déjà en nous depuis notre baptême, et que nous lui redisons : « Grandis ! Grandis ! Ne me laisse pas dans ma ténèbre ! Viens, Seigneur, éclairer mes chemins !»
Il y eut un soir, il y eut un matin…
Il y eut un Avent…
Frédéric MONNIN, décembre 2019
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