L’abbé Pascal Desthieux, Vicaire épiscopal pour le canton de Genève, nous propose l’homélie de ce dimanche de Pâques, fête de la Résurrection.
Lectures du jour – dimanche 12 avril 2020 – Résurrection du Seigneur
Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité !
C’est ainsi que nos frères orientaux se saluent en la fête de Pâques.
Cela me fait penser à une très belle histoire, véridique :
Nous sommes en pleine époque soviétique. Les campagnes étaient sillonnées par les agents communistes qui propageaient leur idéologie, réunissaient les villageois, organisaient des conférences forcées et des débats contradictoires pour apprendre aux gens que Dieu n’existait pas, que seule la lutte des classes comptait. On raconte qu’un propagandiste particulièrement chevronné et infatigable qui, après deux heures de discours pour expliquer combien le peuple aurait raison de reléguer le christianisme aux obscurités du Moyen Age, avait terminé sa harangue par cette question : « vous avez bien compris ? », à quoi ils répondirent « oui ».
Et le vieux pope du village qui avait pour mission de présenter sa version des faits – dans le but d’être ridiculisé – monta sur l’estrade improvisée et ne dit qu’une seule phrase : « Christ est ressuscité » et l’ensemble des villageois répondit : « Il est vraiment ressuscité ! » Les propagandistes ont pu repartir.
Cette histoire et l’épreuve que nous traversons actuellement en ce temps de pandémie et de lutter contre un virus meurtrier nous établit en grande communion avec tous les chrétiens qui sont privés de messe. Cela a été le cas pendant longtemps en Russie, et aussi en Guinée que nous avons visité après Noël avec une douzaine de Genevois et nos deux prêtres Guinéen de Genève, Côme et Elie. En 1967, le dictateur Sékou Touré a expulsé tous les missionnaires, et le pays grand comme cinq fois la Suisse s’est retrouvé pratiquement sans prêtre pendant une quinzaine d’année ; les catéchistes et responsables de communautés se sont mobilisés et ont animés les communautés privées des sacrements pendant tout ce temps de persécution.
Pour nous chrétiens, c’est difficile et douloureux de ne pas pouvoir nous rassembler en communautés paroissiale pour fêter le Ressuscité. Nous sommes en profonde communion en temps où tous nos contemporains sont touchés, meurtris de ne pouvoir se déplacer pour fêter en famille, partir en vacances, etc. Comme l’a dit le pape François dans son émouvante bénédiction exceptionnelle Urbi et Orbi, nous sommes dans la même barque, ballotés par ces immenses vagues de l’épidémie, mais avec la confiance que le Christ est avec nous.
Comme il a rejoint ses disciples le soir de Pâques alors qu’ils s’étaient confinés par peur d’être arrêtés comme leur maître, le Christ Ressuscité vient nous rejoindre aujourd’hui en cette fête de Pâques.
Aujourd’hui, nous fêtons Pâques, malgré tout.
Aujourd’hui, nous trouvons d’autres manières de vivre ce jour béni.
Aujourd’hui. C’est ainsi que commence la prière d’ouverture de cette messe de Pâques : « Aujourd’hui Dieu notre Père, tu nous ouvres la vie éternelle par la victoire de ton Fils sur la mort, et nous fêtons sa résurrection. »
« Aujourd’hui » : ce premier mot indique que nous ne fêtons pas seulement un événement du passé : c’est aujourd’hui que cela se passe.
C’est aujourd’hui que Dieu notre Père nous ouvre la vie éternelle par la victoire de son fils sur la mort !
Le Christ n’est pas ressuscité seulement pour lui : par sa victoire sur la mort, il nous ouvre la vie éternelle !
Aujourd’hui, Dieu notre Père, tu nous ouvres la vie éternelle par la victoire de ton Fils sur la mort. La prière d’ouverture se poursuit ainsi : Que ton Esprit fasse de nous des hommes nouveaux pour que nous ressuscitions avec le Christ dans la lumière de la vie.
C’est ce que nous pouvons nous souhaiter aujourd’hui : qu’en fêtant la résurrection du Christ, l’Esprit Saint fasse de nous des hommes nouveaux, des femmes nouvelles, que nous laissions derrière nous le « vieil homme », tout ce qui nous entrave, et que le Seigneur ressuscite ce qui est mort, cassé, meurtri, découragé en nous.
La fête de ce jour nous redit que nous sommes des hommes et des femmes qui n’allons pas vers le néant, mais qui ressusciterons « avec le Christ dans la lumière de la vie ». Soyons, des témoins joyeux de cette Bonne Nouvelle !
Comme le dit saint Paul dans la lecture de ce jour de Pâques, que le levain du Ressuscité fasse de nous une « pâte nouvelle », un « pain de la Pâques ». Et que nous puissions apporter ce petit peu de levain à celles et ceux que nous croiserons aujourd’hui – ils sont peu nombreux à cause du confinement. Mais si nous appelons des proches ou des personnes seules, ou si nous envoyons des SMS ou des Whats’app, nous pourrons leur dire :
Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité !
Abbé Pascal Desthieux
Vicaire épiscopal
Crédit image homélie de Pâques: (cierge pascal à Tamier) DR
Homélie de Pâques, 12 avril 2020
Image: Pascal Deloche / Godong