À l’occasion du 88e anniversaire du pape François le 17 décembre 2024, l’agence I.MEDIA propose une rétrospective de quelques grandes dates qui ont marqué cette année.
Dès le début de cette année, le pape se trouve confronté aux divisions suscitées par le document Fiducia supplicans (publié fin 2023), autorisant la bénédiction non liturgique des couples homosexuels. Certains font entendre leurs vives protestations face à cette initiative du dicastère pour la Doctrine de la foi (DDF). C’est le cas notamment des évêques africains, qui, sous la houlette de leur chef de file, le cardinal Fridolin Ambongo, publient une déclaration refusant de l’appliquer. En mars, autre revers, cette fois dans le domaine œcuménique : l’Église copte-orthodoxe annonce la suspension de son dialogue théologique avec Rome. Le préfet du DDF, le cardinal Fernández, doit être envoyé au Caire en mai pour une explication directe avec le pape copte Tawadros II.
Durant les premiers mois de l’année 2024, le pontife traîne une affection respiratoire qui le force à annuler de nombreux rendez-vous, et à confier la lecture de ses textes à des collaborateurs. Sa remise en forme est longue. Encore fin mars, pour se préserver du froid, il annule au dernier moment sa participation au fameux Chemin de croix du Vendredi saint au Colisée, où sa chaise blanche reste vide. Au fil de ces épisodes d’alertes, les rumeurs de démission et de prochain conclave vont bon train, et l’on conjecture déjà sur les ‘papabile’. Mais son état physique étonne à l’automne, au fil de ses voyages et de ses engagements, où il se montre infatigable. Sa forme s’est maintenue jusqu’en cette fin d’année, même si, début décembre, le pontife a subi une chute, qui lui a laissé un hématome au menton.
Dans un livre d’entretien avec un vaticaniste espagnol, publié sous le titre Le Successeur, le pape François revient sur ses relations avec son prédécesseur Benoît XVI, décédé le 31 décembre 2022. Apportant un démenti à ceux qui voulaient les opposer, le pape argentin assure que, lors du conclave de 2005, le cardinal Joseph Ratzinger était son « candidat ». Il explique le considérer comme « un enfant prodige de la théologie ». Mais le pontife argentin laisse transparaître sa mésentente avec l’ancien secrétaire du pape émérite, Mgr Gänswein, et il dénonce aussi le climat de surprotection entretenu par l’entourage de Benoît XVI à la fin de sa vie, considérant que ses médecins l’avaient comme mis en « garde à vue ». Le pape révèle aussi souhaiter un rituel simplifié pour ses propres obsèques, indiquant que sa tombe est déjà prête, à la basilique Sainte-Marie-Majeure.
Le pape François se rend à la Biennale de Venise, où il prononce un discours dans lequel il affirme que « le monde a besoin des artistes ». Dans le pavillon du Saint-Siège, situé dans la prison de l’île de la Giudecca, le pontife argentin salue les prisonnières et met en valeur les femmes artistes comme Frida Kahlo et Louise Bourgeois. Lors d’une messe, le pape encourage les Vénitiens à protéger le patrimoine écologique de la Sérénissime mais aussi « son patrimoine humain ». Il effectuera deux autres déplacements au nord-est de l’Italie, à Vérone le 18 mai pour un rassemblement pour la paix organisé dans les Arènes, et à Trieste le 7 juillet pour une rencontre sur la démocratie.
« Le pape n’a jamais eu l’intention d’offenser ou de s’exprimer en termes homophobes, et il présente ses excuses à ceux qui se sont sentis offensés par l’utilisation d’un terme rapporté par des tiers ». En ces termes, le Bureau de presse du Saint-Siège se fend d’un communiqué, alors qu’un mot du pape a déclenché la polémique dans la presse. À huis-clos devant les évêques italiens, le pontife aurait utilisé une expression italienne insultante – frociaggine, un dérivé de « tarlouze » – pour désigner des personnes homosexuelles. Un dérapage qui a suscité l’incompréhension de la part d’un pontife connu pour son ouverture pastorale pour les couples de même sexe. À la consternation générale, le pape réitèrera d’ailleurs l’emploi de cette formule lors d’une rencontre avec des prêtres de son diocèse de Rome, le 11 juin.
C’est pour signifier l’urgence d’encadrer l’intelligence artificielle que le pape de 87 ans se déplace à Bari pour le sommet du G7. Entre deux sessions de courtes rencontres bilatérales – le pape s’entretient notamment avec les présidents Macron (France), Zelensky (Ukraine) ou Trudeau (Canada) -, il prend la parole pour décomposer la mécanique de l’IA et tenter de convaincre les responsables de la nécessité d’agir politiquement et juridiquement face à un outil « fascinant et redoutable ». Depuis 2020, le Saint-Siège est investi pour promouvoir une éthique de l’IA.
Avec 44 h de vol et 32.000 km parcourus, la grande tournée de septembre en Asie et Océanie bat tous les records de voyages du pape François. Plus étonnant : le pontife de près de 88 ans semble revigoré par ce périple. En Indonésie, François encourage une Église minoritaire à trouver sa place aux côtés de la plus grande population musulmane du monde. Pour la première étape océanienne de son pontificat dans la verdoyante Papouasie-Nouvelle-Guinée, il se fait missionnaire de paix contre les violences endémiques qui ravagent ce pays. Ensuite porté en triomphe au Timor oriental, pays très catholique dont il vante la jeunesse, il visite enfin la cosmopolite Singapour où il plaide pour l’harmonie entre les religions et le respect des migrants.
Après une étape symbolique au Luxembourg pour saluer le cardinal Jean-Claude Hollerich, le pape François effectue un voyage en Belgique, qui s’avère l’un des plus difficiles de son pontificat. Lors de leurs discours d’accueil au Palais royal, le roi et le Premier ministre interpellent le pape sur les scandales d’abus sexuels commis par des prêtres. Après avoir longuement reçu des victimes, le pape modifie le texte de son homélie de la messe célébrée au stade Roi-Baudouin afin de demander aux évêques de de lutter plus efficacement contre ce fléau. Au terme de cette messe, le pape annonce ouvrir le procès en béatification du roi Baudouin, en raison de son opposition à la légalisation de l’avortement. Les positions “pro-vie” du pape François et sa vision traditionnelle du rôle de la femme lui valent d’être fortement critiqué lors de ses visites en milieu universitaire, à Leuven, en territoire flamand, et à Louvain-La-Neuve, en terre francophone.
Tout le mois d’octobre, le pape préside la deuxième session du Synode sur la synodalité, durant laquelle 368 membres du monde entier – dont 25% ne sont pas évêques – planchent ensemble pour réfléchir à une Église catholique plus inclusive, plus participative et moins cléricale. Cette session devait conclure un cycle initié en 2021, mais en réalité le chantier reste encore ouvert. Les dix groupes de travail institués par François pour étudier certaines thématiques délicates – partage du gouvernement, réforme des séminaires, accès des femmes au diaconat… – doivent en effet rendre leur conclusion au mois de juin prochain. À l’issue du Synode, le pontife décide de signer le Document final des membres du Synode, l’intégrant de fait à son magistère. Il n’y aura donc pas d’exhortation apostolique.
Pour la troisième fois, le Saint-Siège et la Chine renouvellent l’accord provisoire de 2018 qui régit les procédures de nomination des évêques en Chine. Si le texte reste provisoire et secret, la diplomatie pontificale du cardinal secrétaire Pietro Parolin obtient une avancée concrète: l’accord est reconduit pour quatre ans, et non plus deux. Après une année 2023 délicate, l’année 2024 aura été bien meilleure pour les relations sino-vaticanes : au Vatican, les audiences générale sont désormais aussi résumées en mandarin, des évêques chinois ont participé au Synode et à un colloque sur les 100 ans du « Concile chinois », et l’accord a permis la nomination de cinq nouveaux évêques.
Le pape continue de composer le collège chargé d’élire son successeur en nommant 21 cardinaux dont 20 ont moins de 80 ans et pourraient donc voter en cas de conclave. Dans sa 10e promotion, François choisit notamment des profils en phase avec les réformes pastorales lancées depuis 2013, comme le théologien Timothy Radcliffe ou l’archevêque d’Alger Jean-Paul Vesco. Si l’Afrique reste peu représentée (2 cardinaux dans ce consistoire), l’Asie continue sa progression et représente 16% du collège et même 18% en intégrant les cardinaux du Moyen-Orient – l’archevêque de Téhéran Dominique Mathieu fait partie de la dernière promotion. Sur les 140 cardinaux électeurs actuels, le pape en a nommé près de 80%.
Alors que la rumeur d’une présence du pape se répand en septembre, le pape rétorque, dans l’avion de retour de sa tournée en Asie, qu’il n’y viendra pas. Cette absence fera l’objet de nombreuses critiques. Préférant une fois de plus les périphéries au centre, il crée la surprise en choisissant de se rendre une semaine plus tard en Corse, à l’occasion d’un colloque sur la religiosité populaire organisé par l’évêque d’Ajaccio, le cardinal François Bustillo. À Ajaccio, le pape met en valeur une “saine laïcité” dont la Corse, où les traditions catholiques demeurent très ancrées, représente à ses yeux un modèle. Sa rencontre avec le clergé local et la messe célébrée sous la statue de Napoléon Bonaparte montrent le lien fort de la population corse avec l’évêque de Rome. Ce troisième passage en France du pape se conclut par un nouvel entretien avec le président Emmanuel Macron, qui, comme un clin d’œil pour clore la polémique, lui offre un livre sur la reconstruction de Notre-Dame de Paris. (cath.ch/imedia/mp)
17 décembre 2024 | par I.MEDIA publié sur cath.ch