
Le plafond du Sacré-Cœur : restauration des médaillons
En 1901, une figure emblématique de la sculpture européenne voit le jour à St-Sulpice, Neuchâtel. Roger Ferrier, sculpteur et pédagogue de renom, se lance dans un périple artistique et éducatif qui le mène à influencer profondément les paysages urbain et culturel genevois. Sa naissance coïncide avec une époque de profondes mutations artistiques, offrant un terreau fertile à son talent et à sa vision. Le parcours de Ferrier, marqué par un apprentissage rigoureux et des collaborations prestigieuses, dépeint l’histoire d’un homme dédié à l’excellence dans l’art de la sculpture sur pierre et dans la transmission de son savoir.
1901 : naissance d’un sculpteur genevois


Plafond de l’église du Sacré-Coeur après la rénovation en 2024
C’est grâce à ces collaborations qu’il est entrée en relation avec des architectes qui lui ont conféré des travaux de sculpture. Il a représenté pendant un an le Consortium marbrier de France Fèvre & Cie et a eu à s’occuper des revêtements des façades de la Société des Nations (SDN) et de questions relatives au monument Albert Thomas au Bureau International du Travail (BIT), tous deux situés à Genève.
Un chapitre fondamental de la vie de Roger Ferrier a été celui de l’enseignement, principalement à Genève dans le public et le privé.
Roger Ferrier avait établi de solides liens d’amitié avec Adolphe Guyonnet, qui l’a présenté au Groupe de St-Luc, constitué officiellement en 1932, il a réuni jusqu’à 150 membres, avant tout des artistes formés aux Ecoles des Beaux-Arts ou des Arts Industriels
1939 : nouveau plafond de l’église du Sacré-Coeur
En 1939, l’architecte Adolphe Guyonnet a confié à Roger Ferrier la réalisation des éléments du nouveau plafond de l’église du Sacré-Cœur. Roger Ferrier a en effet réalisé en stuc 14 thèmes différents pour 24 panneaux de grandes dimensions. Parmi les motifs décoratifs du plafond, qui mesure 30 mètres sur 12 mètres, on trouve :
Le monogramme du Christ, appelé également Chrisme, est un symbole chrétien formé parles deux majuscules grecques X (chi) et P (rhô), la première étant apposée sur la seconde. Ces deux lettres sont les premières du mot grec qui signifie Christ.
Le Poisson, les premiers chrétiens persécutés par les autorités romaines l’utilisaient comme code secret pour se reconnaître entre eux. Ce symbole est le signe de la Résurrection, celui de l’eau du baptême et de tous les chrétiens baptisés dans la piscina ou le baptistère.
L’Eucharistie, évoque le Christ avec le blé (corps), les raisins (sang), l’aiguière (le Saint-Graal) et le tournesol se référant au rayonnement du Christ
Le Cerf, dans le bestiaire biblique, cet animal est symbole de fertilité, longévité et résurrection
Les quatre évangélistes, à savoir Saint Mathieu représenté par l’homme-ange ; Saint Marc et le lion, Saint Luc et le taureau, Saint Jean et l’aigle
Le pélican, se donne lui-même en pâture à ses petits, et qui représente Jésus-Christ
L’Agneau pascal, représente le sacrifice ultime du Christ pour la rédemption des hommes.
Le blason du pélican et de l’agneau pascal ont été supprimés après l’incendie lors de la rénovation du Sacré-Cœur afin de permettre la création du puits de lumière au fond de l’église, devant l’olivier.
Restauration des médaillons après l’incendie
L’eau d’extinction de l’incendie survenu le 19 juillet 2018 a gravement endommagé plusieurs parties artistiques du bâtiment. Les médaillons en staff qui ornaient le plafond de l’église – et qui sont un symbole restant de l’origine franc-maçonne du bâtiment – ne sont plus en état d’être restaurés. Selon les experts, les médaillons devaient être reconstruits à neuf, sur la base de moulage des anciens médaillons, de même que le plafond de la nef. Les colonnes de la nef ont dû être toutes renforcées (pour tenir le poids de la rénovation du bâtiment) et restaurées complètement, y compris les chapiteaux et les socles de colonne. Le Service des Monuments et Sites a également imposé aux artisans de retrouver la couleur originale de peinture de quelques colonnes.
Le tétramorphe

L’homme-ange est Matthieu : son évangile débute par la généalogie humaine de Jésus.
Le lion est Marc : dans les premières lignes de son évangile, Jean le Baptiste crie dans le désert (« un cri surgit dans le désert »).

L’aigle est Jean : son évangile commence par le mystère céleste.
Le plafond de Roger Ferrier dans l’église du Sacré-Cœur a retrouvé tout son éclat, nous vous invitons à venir l’admirer.
Roger Ferrier aimait à dire « Mon œuvre n’est pas dans les musées, mais dans la vie »
SD&C juin 2024
