Durant la Semaine Sainte nous vous proposons une méditation quotidienne, signée par une femme. Aujourd’hui, nous donnons la parole à Isabelle Hirt.
Lectures du 10 avril 2020 – Vendredi Saint
« Où serait l’Église de Jésus-Christ, elle-même Corps du Christ, si elle n’était pas là d’abord, au pied de la croix ? Je crois qu’elle meurt de ne pas être assez proche de la Croix de son Seigneur. Si paradoxal que cela puisse paraître, comme le montre bien Saint Paul, sa force, sa vitalité, son espérance et sa fécondité, lui viennent de là. Pas d’ailleurs, ni autrement. Tout le reste n’est que poudre aux yeux, illusion mondaine.
Elle se trompe elle-même et elle trompe le monde lorsqu’elle se situe comme une puissance parmi d’autres, comme une organisation humanitaire ou même comme un mouvement évangélique à grand spectacle. Elle peut briller, elle ne brille pas du feu de l’amour “fort comme la mort”, comme le dit le Cantique des Cantiques. Car il s’agit bien ici d’amour, d’amour d’abord et d’amour seul. Une passion dont Jésus nous a donné le goût et tracé le chemin : “Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis”. »
Pierre Claverie, (1938-1996), évêque d’Oran. Extrait de sa dernière homélie donnée en France, parue dans La Vie spirituelle n°721, décembre 1996.
Aujourd’hui, vendredi 10 avril 2020, Vendredi Saint, nous vénérons la croix de notre Sauveur, selon la liturgie catholique romaine. Mais cette année, nous la vénérons seul chacun chez soi, dans le confinement.
Pas de grand spectacle, pas de poudre aux yeux, pas de communion non plus, nous contemplons dans la solitude, cet amour qui se donne pour les multitudes. Le sens de la passion du Christ, le sens de la croix, ce n’est pas la souffrance, même si elle est spectaculaire et que l’homme, de tout temps, a aimé la mettre en avant, l’exhiber. Non, le sens de la croix, c’est l’Amour, cet Amour qui seul permet la foi et l’espérance, qui seul vainc la mort.
Cette prière, seul au pied de la croix, unissons-la à celle du Christ souffrant et agonisant sur la croix et laissons-la monter vers le Père. Portons avec Jésus cette souffrance humaine, plus que jamais visible aujourd’hui dans cette situation particulière de pandémie, ici, à côté de chez nous ou même chez nous.
Prions pour tous les malades, pour les soignants et tous ceux qui s’exposent pour permettre que la vie continue, pour les personnes qui souffrent de la solitude, celles qui perdent un être cher et doivent lui dire adieu dans le confinement, celles qui donnent la vie sans la présence du père de l’enfant et des proches, celles qui ne comprennent pas, qui n’acceptent pas et se mettent en danger, ainsi que leur entourage. Prions pour les familles qui vivent dans un climat de violence ou délétère, pour ceux qui redoutent la crise économique ou connaissent déjà une situation matérielle précaire. Prions pour tous ceux et celles que ce temps de crise impacte ou impactera dans leur quotidien et dans leur dignité.
Nous sommes l’Église, même confinés, nous sommes la multitude, même seuls. Que ce temps de Pâques si particulier nous ramène enfin à l’essentiel : faire corps au pied de la croix pour donner sens à toutes les souffrances de notre temps.
Dans quelques heures nous nous souviendrons que la mort a été vaincue une fois pour toutes par Christ. Et nous exulterons, toujours confinés, Il est vraiment ressuscité !!
Isabelle Hirt, répondante des trois paroisses de l’Unité pastorale Salève, avril 2020
Crédit image: Centre Aletti