La Toussaint est l’occasion de réfléchir sur les prières adressées aux saints. Que signifie prier les saints ?
La vénération des saints et saintes de Dieu remonte aux premiers siècles du christianisme.
Est-ce une dérive, comme certains chrétiens le pensent en s’appuyant sur quelques références bibliques ?
En général, c’est ce passage du Deutéronome qui est cité comme argument : « On ne trouvera chez toi…personne qui use de magie, interroge les spectres et les esprits ou consulte les morts » (Dt 18,11).
Il y a confusion, car ce passage concerne exclusivement l’occultisme. Lorsque des personnes croyant à un monde parallèle font appel à des esprits ou à des forces démoniaques.
Se tourner vers les saints n’a rien à voir ! Il n’est pas question de magie ou de sorcellerie, car les saints sont membres du corps du Christ. Ils ont quitté ce monde en amitié avec le Christ et l’ont rejoint.
Demander l’intercession des saints n’est pas une démarche de magie ou de superstition.
Au contraire. Prier les saints est une attitude de foi, dans une communion qui unit mystérieusement les réalités du ciel à celles de la terre. En vue du Royaume à venir.
L’Eglise affirme qu’il n’y a qu’un seul Dieu et son approche du Dieu unique est trinitaire : on ne prie que Dieu seul, c’est-à-dire le Père, par le Fils dans l’Esprit.
Les plus anciens témoignages indiquent que les prières s’adressent au Père « par son Enfant Jésus Christ ». Le culte est donc consacré à Dieu seul.
Quant aux saints et saintes reconnus comme tels par leur exemplarité de vie, ils ne bénéficient pas d’un culte au sens de celui qui est rendu à Dieu. La Vierge Marie et les saints sont invoqués, mais pas adorés, au sens biblique du terme. Si des exagérations existent dans certaines formes de piété populaire, elles ne sont pas conformes à la vraie Tradition. En tout cas, s’adresser aux saints n’a rien à voir avec la nécromancie ou le spiritisme !
Comment se fonde la confiance en l’intercession des saints :
Apocalypse 8, 3 nous montre la prière des saints qui monte en offrande devant Dieu avec l’encens dans le Temple .
« Un autre ange vint. Il se plaça vers l’autel, tenant un encensoir d’or. On lui donna beaucoup de parfums (qetoret) afin qu’il les offre avec les prières de tous les saints, sur l’autel d’or devant le trône. La fumée des parfums monta de la main de l’ange devant Dieu avec les prières des saints ».
Lisons Exode 32,9 : « L’Eternel dit à Moïse : je vois que ce peuple est un peuple réfractaire. Maintenant laisse-moi faire. Ma colère va s’enflammer contre eux et je vais les faire disparaître, tandis que je ferai de toi une grande nation.
Moïse implora l’Eternel son Dieu et dit : pourquoi, Eternel, ta colère s’enflammerait-elle contre ton peuple, celui que tu as fait sortir d’Egypte avec grande puissance et force ? Renonce à ton ardente colère et reviens sur ta décision de faire du mal à ton peuple !
Souviens-toi d’Abraham, d’Isaac et d’Israël, tes serviteurs… L’Eternel renonça alors au mal qu’il avait déclaré vouloir faire à son peuple »
Nous voyons que l’intercession d’amis de Dieu et de saints est puissante.
Une objection fréquente contre l’intercession des saints est la référence à Timothée 2,5 : « En effet, il y a un seul Dieu et un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, Jésus Christ ».
Certes Jésus est médiateur, mais rien n’empêche que d’autres interventions s’expriment dans le cadre inclusif de cette unique médiation. Quand le Jésus johannique se présente comme unique berger, cela ne l’empêche pas de désigner Pierre pour conduire ses moutons (Jn 21,15).
On voit que l’apôtre Paul n’hésite pas à demander aux « saints » (membres des communautés) de prier pour lui : « Je vous en supplie, frères et sœurs, par notre Seigneur Jésus Christ et par l’amour de l’Esprit, combattez avec moi, en adressant à Dieu des prières en ma faveur » (Rom 15,30). Il ajoute que les prières fortifient les charismes des uns et des autres : « vous contribuerez vous-mêmes par la prière, ainsi la grâce obtenue pour nous par beaucoup de gens sera une occasion de remercier Dieu »
Si Jésus a apporté une rédemption parfaite, de nombreuses souffrances sont encore inévitables pour les membres de l’Eglise afin qu’ils contribuent à leur salut déjà obtenu en espérance dans l’oblation du Christ.
Les sacrifices, les souffrances complètent ainsi les prières pour intercéder auprès du Père afin que tous reçoivent la grâce d’être fidèles à sa volonté.
C’est la base de la doctrine catholique de la communion des saints qui se fonde sur les enseignements bibliques : des hommes se tournent vers d’autres hommes pour des prières d’intercession. Les saints du ciel intercèdent en raison de l’unité du Corps du Christ. 1 Cor 12,12 : « Tous les organes du corps humain malgré leur grand nombre, ne forment qu’un seul corps… »
Invoquer les saints du ciel c’est croire en leur bienveillante intercession.
Matthieu 17,2 : « Jésus fut transfiguré devant eux. Son visage resplendit comme le soleil, et voici que Moïse et Elie leur apparurent, ils s’entretenaient avec lui ». Jésus ne s’entretient pas avec des morts !
Visiblement, les saints et les amis de Dieu – même après leur départ de ce monde – s’intéressent aux situations terrestres vécues par les hommes et ils intercèdent pour eux.
Hébreux 12 parle des esprits des justes – appelés « saints » – devenus parfaits et qui, avec les anges du ciel, font partie de la nuée de témoins qui nous soutiennent.
Hébreux 1,14 : « les anges ne sont-ils pas tous des esprits au service de Dieu, envoyés pour apporter de l’aide à ceux et celles qui vont hériter du salut ? »
Le livre de l’Apocalypse de Jean donne plusieurs aperçus de l’intercession des saints dans le ciel en faveur des vivants sur terre :
« Un autre ange vint. On lui donna beaucoup de parfums afin qu’il les offre avec les prières de tous les saints ».
Et Apocalypse 5,8 : « Chacun tenait une harpe et des coupes remplies de parfums qui sont les prières des saints ».
Et au chapitre 6, on voit des saints victimes du martyre qui demandent à Dieu de faire justice pour leur sang versé. 6,9 : « Quand il ouvrit le cinquième sceau, je vis sous l’autel l’âme de ceux qui avaient été mis à mort à cause de la Parole de Dieu et à cause du témoignage qu’ils avaient rendu. Ils crièrent : jusqu’à quand, Maître saint et véritable, tarderas-tu à faire justice ? »
Les âmes des martyrs crient sous l’autel. Cela explique que dès les premiers temps des reliques de saints ont été placées sur les autels. Elles rappellent le lien entre le ciel et la terre.
Dans Hébreux chapitre 12, on trouve une description de l’Eglise de Jésus Christ dans la majesté céleste.
Il est dit que le chrétien qui s’approche de cette réalité s’approche des esprits des justes parvenus à la perfection, les saints.
Hébreux 12,22 : Vous vous êtes approchés du Mont Sion, de la cité du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste, avec ses dizaines de milliers d’anges en fête, de l’assemblée des premiers-nés inscrits dans le ciel.
Vous vous êtes approchés de Dieu qui est le Juge de tous, des esprits des justes parvenus à la perfection, de Jésus qui est le médiateur d’une alliance nouvelle… »
Les esprits parvenus à la perfection, les saints, sont dans les cieux. Ils sont présents avec ceux dont le chrétien s’approche dans le cadre de l’Eglise céleste.
Dieu est glorifié par les saints et les prières d’intercession. On voit bien que les saints par leur présence renforcent la gloire de Dieu et ne la diminuent pas.
Les serviteurs les plus proches de Dieu manifestent la splendeur de son règne. Ils font tout pour la partager à ceux qui la désirent.
Vénérer les saints, c’est vénérer la lumière divine qui les illumine et qui rayonne dans notre direction.
La médiation unique du Christ et le lien de piété avec les saints du ciel ne s’opposent pas.
Le livre des Actes des apôtres nous dit comment la prière confiante de Paul a sauvé la vie d’un grand nombre de personnes :
« Un ange du Dieu auquel j’appartiens et que je sers m’est apparu et m’a dit : Paul n’aie pas peur, il faut que tu comparaisses devant l’empereur, et voici que Dieu t’accorde la vie de tous ceux qui naviguent avec toi ! »
En Philippiens 3,17 : « Portez les regards sur ceux qui se conduisent suivant le modèle que vous avez en nous ». Aussi, en Jacques 5,10 : « prenez pour modèles de patience dans la souffrance les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur ».
Cette recommandation a donné naissance dès les temps apostoliques à la vénération des témoins de la vraie foi.
Elle est à l’origine de la reconnaissance envers ceux et celles qui par leur fidélité au Christ apportaient le réconfort de leur mémoire vivante aux membres des communautés.
C’est ce qui a par la suite amené l’Eglise à reconnaître officiellement les mérites lumineux de certains hommes et certaines femmes pour les donner en exemple à tous.
Dans un esprit communautaire, l’Eglise encourage les demandes d’intercession et les invocations. Le partage des bénédictions peut faire reculer l’influence du mal.
Abbé Alain René Arbez