Messes publiques suspendues, rencontres en paroisse annulées… Comment vivre la foi au temps du coronavirus ? Nous vous proposons dès aujourd’hui une série de témoignages.
J’ai 28 ans, je vis à Genève, en Suisse depuis 5 ans, je suis chef d’entreprise, je suis catholique pratiquante. Célibataire, j’ai vécu le confinement seule et loin de ma famille.
J’ai été choquée surtout que c’était jusqu’au 31 mai, donc ça m’a surprise, je me suis dit tout de même que ce fût violent : du jour au lendemain, plus rien. Mais j’ai compris d’un point de vue sanitaire donc j’ai accepté. J’ai fait confiance à l’évêque pour la voix de la prudence. J’ai surtout pensé aux personnes âgées, car pour certains, la messe, c’est leur seule sortie.
Le premier dimanche, je suis allé sur Internet pour voir la messe. J’ai vu après sur Facebook des messes de paroisses en direct, donc j’ai pris les messes de prêtres que je connaissais. Avec des amis on a regardé les mêmes messes le dimanche pour être en communion. J’ai aussi regardé la messe d’une paroisse de l’Emmanuel, car les prêtres sont jeunes et sympathiques : ils nous font rire en faisant des cœurs avec leurs mains à la fin de la messe ! J’ai fait du tourisme à la recherche de messe sur les réseaux sociaux, mais j’ai surtout regardé les messes des prêtres que je connais.
J’ai fait du tourisme à la recherche de messe sur les réseaux sociaux, mais j’ai surtout regardé les messes des prêtres que je connais.
Je prie encore plus, étonnamment. Il y a une communion qui s’est installée grâce aux réseaux sociaux. Je me connecte à la prière de Taizé en live Facebook tous les soirs à 20h30. On chante dans toutes les langues, il y a 3.000 personnes connectées et on prie pour les soignants, les malades… Les premières semaines, je faisais ça tous les soirs.
Aussi, je me suis créé un beau coin prière, c’est précieux, ça rythme les journées, car le soir pendant le confinement, c’est là que je commence à avoir le moral dans les chaussettes donc prier le soir permet de tenir. On voit qu’il y a des potes, pleins de gens de partout qui se connectent. Les frères guident la prière. Prier en groupe ça aide.
Je suis contente, car finalement, j’ai réussi à faire des choses que j’avais du mal à mettre en place spirituellement. Pour le Carême, j’ai essayé de faire des efforts de privation, mais c’était difficile pour la nourriture. Quand on est enfermé, on a plus envie de manger.
Au début, je voulais essayer de rentrer en France pour voir ma famille, mais ce n’était pas possible, et cela aurait été égoïste. Alors je me suis organisée pour partager des expériences avec des amis.
Le Jeudi Saint, on a suivi un document des dominicains, reçu par un groupe WhatsApp, pour vivre chez soi le Triduum. Tout est décrit : bénir le repas, du vin sur la table… On a lu la Parole pendant le repas, pour faire mémoire de la Pâque. Nous avons prié.
Le Vendredi Saint, nous avons fait un chemin de croix, mais sans marcher, chez une amie. Nous avons, trouvé les méditations de Benoit XVI. On a mis une croix et une bougie et nous avons lu les méditations de chaque station.
Le Samedi Saint, nous nous sommes rendus chez une amie, nous avons allumé le feu dans une cheminée, pour faire le feu nouveau. Pour nous accompagner, nous avions choisi la Vigile Pascale en ligne avec une paroisse.
Ma famille m’a appelée. Ils étaient inquiets. Mais j’ai passé une bonne fête de Pâques.
Les prêtres que je suis sur les réseaux sociaux évoquent une célébration de retrouvailles, des messes spéciales. J’imagine une belle messe de joie, de retrouvailles. Revoir les autres, prier ensemble. Il sera aussi important d’aider tous ceux qui n’ont pas pu faire leurs deuils.
J’ai trouvé magnifique l’élan qu’il y a eu sur les réseaux sociaux, ça m’a fait beaucoup du bien de revoir mon ancien aumônier scout qui partage ses prières tous les soirs, en Facebook live, c’est trop beau.
C’est merveilleux la façon dont il gère sa paroisse et la proximité qu’il a avec les gens, il reste proche, c’est vraiment le berger de sa communauté. Il n’est pas décalé de notre réalité quotidienne. On dit souvent qu’un chrétien seul c’est un chrétien en danger. J’espère que cet élan et cette communion transmis par le canal digital continueront.
J’espère que cet élan et cette communion transmis par le canal digital continueront.
J’ai contacté la responsable de l’équipe « Fratelli » de la paroisse qui a activé une « fraternité téléphonique » afin de rompre l’isolement et la solitude de certains en cette période difficile. Je pensais à eux tout le temps au début du confinement et je me suis mise à disposition. Ils m’ont dit qu’ils mettaient en place un système d’appel, j’ai proposé mes services et ceux de beaucoup d’autres qui étaient prêts à donner de leur temps.
Par ailleurs, j’ai participé à une initiative des scouts à mettre en place des envois de cartes postales à des personnes âgées ou isolées. Aussi, pour la petite histoire, le jour de Pâques je me suis amusée à cacher des œufs de Pâques et des vœux de Joyeuse Pâques dans les boîtes aux lettres de tous mes voisins.
A suivre d’autres témoignages sur la foi au temps du coronavirus.
SD&C, avril 2020
Image: foi et coronavirus – Fred de Noyelle / Godong