Un moment de grande communion a été partagé par la quarantaine de personnes réunies le 10 décembre dernier dans la chapelle de la paroisse Sainte-Clotilde lors de la bénédiction de l’icône de la croix de Saint-Damien, destinée à la nouvelle salle pour les célébrations religieuses de l’établissement de détention de La Brenaz. Il s’agit d’une
magnifique et grande icône en bois réalisée par l’artiste Agnès Glichitch, dans le cadre d’un projet qui a réuni l’Aumônerie œcuménique des prisons et la Pastorale du monde du travail de l’Eglise catholique romaine à Genève.
Le ministère de la beauté, est sans doute l’œuvre de miséricorde dont le monde a le plus besoin ». Ces paroles du moine bénédictin François Cassingena Trévedy ont parfaitement introduit, la célébration de la bénédiction d’une grande icône en bois de la croix de Saint-Damien. C’est la force de la miséricorde, exprimée par la beauté de l’icône, que l’Aumônerie œcuménique des prisons souhaite apporter aux personnes détenues à la Brenaz. L’icône sera installée ces prochains mois dans la nouvelle salle pour les célébrations religieuses de la prison. En outre, elle est déjà dépositaire d’une histoire de communion qui l’enrichit. C’est en effet en pensant aux personnes détenues qu’elle a été conçue et réalisée.
L’icône reproduit la croix de Saint-Damien peinte au 12ème siècle, par des artistes d’origine syrienne en Ombrie. C’est devant cette croix, dans la chapelle Saint-Damien d’Assise, que saint François d’Assise s’est senti interpellé par le Christ qui lui demandait de « rebâtir sa maison en ruines ». L’icône continue à interpeller. C’est pour cela que Federica Cogo, aumônier catholique de l’Aumônerie des prisons à Genève, a souhaité la proposer pour le nouveau lieu dévolu aux cultes à La Brenaz. « Nous disposons d’une reproduction de cette même icône à la prison de Champ-Dollon et durant toutes ces années j’ai vu des personnes de différentes cultures s’approcher spontanément de cette croix. J’ai donc imaginé qu’il serait bien d’en avoir une en vrai et en grand pour La Brenaz.
L’idée de la croix dans un tel lieu n’était pas immédiatement évidente et nous en avons longuement discuté en équipe », explique l’assistante pastorale. La réalisation du projet a aussi requis du temps. C’est grâce au soutien de la Mission intérieure, association suisse pour le soutien matériel à la pastorale de l’Eglise catholique en Suisse, que le financement a pu être partiellement assuré et c’est grâce à la passion de Federica pour les icônes que l’artiste Agnès Glichitch s’y est impliquée.
Le projet de départ était de faire participer quelques personnes détenues à la réalisation de l’œuvre. Mais après un premier avis positif, les responsables de l’établissement n’ont pas accepté de libérer les personnes intéressées de leur travail habituel dans le cadre de la prison. « Pour la direction, il ne s’agissait pas d’un vrai travail mais d’une activité d’aumônerie « , explique Federica.
L’implication d’autres personnes que l’artiste à la réalisation de l’icône était néanmoins une dimension importante du projet. Federica a donc pris contact avec Brigitte Mesot, responsable de la Pastorale du monde du travail, un espace de rencontre pour les personnes qui traversent des périodes de chômage, de maladie ou de réorientation professionnelle. Elle a tout de suite adhéré au projet. « La plupart des personnes qui ont participé n’étaient pas très habiles avec les pinceaux. Il s’agit de personnes fragilisées », souligne Brigitte. Tous n’ont pas pu peindre, mais la participation s’est faite autrement, aussi dans la prière. « Les personnes étaient très impliquées, avaient du plaisir à découvrir, à apprendre à regarder et à interpréter ce que l’on voit », confirme Agnès, iconographe depuis de longues années. « L’icône est pour moi le point de rencontre entre l’art et la spiritualité « .
Pour l’artiste, la croix de Saint-Damien est le crucifix du salut: « Le Christ de l’icône a les bras grands ouverts. Ses yeux ne nous regardent pas, de biais ils nous entraînent ailleurs que sur nous-mêmes, sans condamnation. Le Christ devient ici une échelle pour aller des enfers au ciel, un chemin d’accès à la vie véritable ».